À l'occasion de l'Existrans 2018, Komitid (mais aussi ACCEPTESS-T) a publié le dimanche 14 octobre une série de photos prises durant la marche.
Aucun visage n'était flouté ni dans les photos, ni dans la vidéo accompagnant l'article de Komitid, filmée lors du die-in organisé par le Collectif Sooooo Infect devant l'Hôpital de la Pitié-Salpêtrière.
Lors de la couverture médiatique d'événements impliquant des minorités (dans notre cas trans et inter), il est primordial de s'assurer de l'anonymisation des personnes présentes sur les différents clichés.
Chaque année à l'occasion de l'Existrans, des outing forcés causés par la diffusion de photographies non-floutées comme celles-ci se produisent et se concluent parfois par des campagnes de harcèlement voire de l'exclusion familiale.
Ce n'est pas aux manifestant⋅e⋅s de faire preuve d'une vigilance permanente mais bien aux journalistes de s'assurer de ne pas nuire.
Pour diverses raisons, masquer son visage lors d'une manifestation publique n'est pas toujours possible et ne devrait pas être imposé (d'autant plus que c'est illégal et que la police a déjà mis en garde à vue pour ce motif).
Il est important que les médias (a fortiori alliés LGBTI) prennent conscience de l'importance de protéger les personnes.
Une manifestation n'est pas l'occasion d'exposer des gens individuellement mais de montrer une masse.
Divers collectifs de photographes ont réalisé des reportages sans cadrer les visages ou en les masquant par du traitement.
Mediapart, par exemple, n'a pas utilisé de photos de la manifestation dans son article, uniquement un portrait et des affiches d'archive.
Le Collectif Trans Posé⋅e⋅s a immédiatement posté un tweet dénonçant le non-respect des consignes de manifestations énoncées par le Collectif Existrans avant le départ de la marche.
Le journaliste ayant pris les photos, Xavier Heraud, a réagi en dénigrant les individus et même des organisations militantes de l'Existrans qui avaient rejoint la demande de floutage pour toutes les personnes n'ayant pas donné de consentement explicite. Il a depuis supprimé l'ensemble de ses tweets à ce sujet.
Le lendemain, le rédacteur en chef de Komitid a lui-même appuyé cette position publiquement dans un communiqué confirmant que la rédaction de Komitid était bien au courant de la demande d'anonymiser les personnes mais l'a ignorée.
Puis, après un tôlé amplifié par ce dernier communiqué, le compte de Komitid a publié une annonce de suppression des photos de l'article. Cette annonce mentionnait une prise de contact avec « plusieurs associations organisatrices de l'Existrans », cependant et malgré notre insistance sur le sujet et notre participation à l'organisation nous n'avons pas été contacté⋅e⋅s, d'où ce communiqué.
En conséquence, nous estimons nécessaire de ne plus relayer le travail journalistique produit par Komitid, et de ne plus participer à la production de contenu avec ce média tant qu'une modification de leur politique de traitement des photos de manifestations n'est pas effective.
Les médias ont besoin de sujets pour exister. Nous, en revanche, n'avons pas besoin d'eux pour être visibles. Les personnes trans et inter sont aptes à se représenter elles-mêmes, par exemple via les réseaux sociaux et au travers d'associations.
Nous voulons appeler les médias à changer leurs pratiques liées à la couverture d'événements similaires ou de questions relatives aux trans et inter. Il est intolérable de mettre en danger des personnes dans des situations déjà difficiles au prétexte de respecter une esthétique.
Nous vous laissons avec des pistes de réflexion évoquées par le CIA sur comment se comporter en tant que journaliste en manifestation.
Le Collectif Trans Posé⋅e⋅s,
le mercredi 17 octobre 2018.